Dessin d'illustration de deux travailleurs de chantier devant un chantier en construction

Faute inexcusable de l'employeur : attention aux conséquences financières !

Droit du travail

Vous avez été destinataire d’un courrier de la CPAM vous informant de la réception d’une demande de mise en œuvre de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur initiée par un de vos salariés victime d’un accident du travail ou ayant déclaré une maladie professionnelle. Attention à ne pas prendre à la légère ce type de procédure dont l’impact financier peut être important pour votre société.

Qu’est-ce que la faute inexcusable de l’employeur ?

En vertu du contrat de travail qui le lie à son salarié, l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat[1] à l’égard de son salarié depuis 2002 et les fameux arrêts « amiantes » rendus par la Cour de cassation. Il doit ainsi veiller à la santé et à la sécurité de ses salariés en mettant en place des actions de prévention et en évaluant les risques auxquels ils sont exposés, et ainsi respecter les dispositions prévues par le Code du travail en matière d’hygiène et de sécurité des salariés[2]. Si l’employeur ne respecte pas cette obligation, sa faute inexcusable peut être reconnue à la double condition que le salarié victime parvienne à démontrer que son employeur :

  • Avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé dans le cadre de son travail ;
  • Et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Pour se prémunir de ce type de contentieux, il est plus que nécessaire de mettre en place une politique de prévention efficiente (notamment en évaluant les risques auxquels sont exposés les salariés et en les reportant sur le document unique d’évaluation des risques) et de prendre toutes les mesures immédiates propres à faire cesser le moindre risque dès sa connaissance. Mais qu’en est-il si le salarié parvient à démontrer que la survenance de son accident du travail ou l’apparition de sa pathologie résultent de la faute inexcusable de son employeur ?

Quelles sont les conséquences de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ?

La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur permet au salarié victime d’obtenir une majoration à son maximum de la rente[3], ou de l’indemnité en capital, qui lui a été attribuée par la CPAM au titre des séquelles qu’il conserve des suites de son accident du travail[4] ou de sa maladie professionnelle[5]. Le salarié pourra également demander à être indemnisé au titre des préjudices subis du fait de la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Comment est calculée la majoration de la rente en cas de faute inexcusable ?

La majoration de la rente à son maximum se traduit en général par le doublement du montant de la rente annuelle servie au salarié victime.

Exemple : un salarié se voit attribuer une rente fondée sur un taux d’IPP de 36% des suites de son accident du travail. Le montant de la rente annuelle s’élève à la somme de 3 600€. Si la faute inexcusable est reconnue, le montant de la majoration s’élèvera à la somme de 3 600€ soit une rente annuelle portée à 7 200€. En outre, le salarié bénéficiera d'un rappel basé sur les rentes annuelles versées tenant compte de la majoration et ce pour la période allant de sa consolidation jusqu'à la décision reconnaissant la faute inexcusable de l'employeur[6].

Quelles sont les indemnisations complémentaires qui peuvent être allouées au salarié ?

Au titre de l’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, le salarié peut demander la réparation « du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle »[7]. Le salarié pourra également demander la réparation d’autres préjudices non prévus par le Code de la sécurité sociale (comme le préjudice sexuel, le déficit fonctionnel temporaire ou le recours à une tierce personne par exemple)[8]. Il appartiendra alors au salarié de prouver, pour chaque demande indemnitaire, les préjudices subis. En pratique, les juridictions nomment un expert qui sera chargé de réaliser une expertise médicale judiciaire (l’expert pourra ainsi procéder à un examen médical du salarié, prendre connaissance de son dossier médical et de tous documents lui permettant d’évaluer les préjudices subis). Et c’est le rapport de l’expert qui permettra au salarié de chiffrer les sommes qu’il réclamera au titre de l’indemnisation de ses préjudices. Point important : en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, c’est bien la caisse primaire qui avance l’intégralité des sommes allouées au salarié, en sus des sommes versées au titre de la majoration (et revalorisation) de la rente. Et cette dernière récupèrera ensuite ces sommes auprès de l’employeur.

Vous l’aurez compris, la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur peut avoir des conséquences financières très lourdes. Il est donc important de mettre en œuvre des actions de prévention pour prévenir la survenance d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, mais surtout d’être conseillé par des avocats lorsqu’un salarié met en œuvre une procédure pour voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur. N’hésitez pas à vous faire assister par un avocat en droit du travail du Cabinet Cassius Avocat.

[1]Cass. soc., 28 février 2002, n° 00-11.793

[2]Article L. 4121-1 et suivants du Code du travail

[3]Cf fiche « Quelle indemnisation des séquelles en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle ? »

[4]Pour rédiger une lettre de réserves sur le caractère professionnel de l’accident du travail, allez sur https://www.lecontratdetravail.com

[5]Cette majoration de la rente peut être réduite dans les rares cas où le salarié a lui-même commis une faute inexcusable c’est à dire une « faute volontaire, d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience » (Cass. 2ème Civ., 27 janvier 2004, n° 02-30.693)

[6]Certaines affaires peuvent prendre plusieurs années avant qu’une décision définitive ne soit prise. C’est pourquoi, la CPAM appliquera les coefficients de revalorisation pour toutes les périodes concernées.

[7]L’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale prévoit également des dispositions spécifiques pour les accidents graves ayant entraîné l’attribution d’un taux d’IPP de 100% au salarié ou son décès.

[8]Il s’agira d’obtenir la réparation d’autres chefs de préjudice non couverts par le livre IV du Code de la sécurité sociale (Décision du Conseil constitutionnel du 18 juin 2010).

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