La résiliation judiciaire est un mode de rupture méconnu et donc une source d’appréhension pour les salariés et les employeurs. Demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail c’est ouvrir une procédure devant le conseil de prud’hommes afin d’obtenir la rupture du contrat de travail en raison de manquements de l’employeur à ses obligations. Mais comment le salarié doit-il s’y prendre ? Comment l’employeur doit-il réagir ?Comme la démission[1] [prise d’acte[2], la résiliation judiciaire est un des moyens pour le salarié de rompre le contrat de travail qui le lie à son employeur.
En cas de manquement aux obligations contractuelles, l'employeur et le salarié disposent d’outils différents pour obtenir la rupture du contrat de travail :
exception : l’employeur peut demander la résiliation judiciaire d’un contrat d’apprentissage en cas de faute grave de l’apprenti[3], ce mode de rupture est actuellement le seul ouvert à l’employeur à compter du 45ème jour de ce type de contrat ;
Le salarié doit « saisir » c’est-à-dire formuler sa demande, par courrier ou dépôt en main propre, auprès du conseil de prud’hommes compétent soit :
Pour justifier sa demande, le salarié doit indiquer au conseil de prud’hommes les manquements de son employeur qui le poussent à solliciter la rupture de son contrat de travail. Les manquements de l’employeur à ses obligations contractuelles doivent être suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de travail à ses torts[4].
Ce qu’il faut retenir c’est qu’en cas de demande de résiliation judiciaire, le salarié continue à exécuter son contrat de travail et donc reste dans l’entreprise pendant toute la durée de la procédure. Le salarié ne quittera l’entreprise que si le conseil de prud’hommes prononce la rupture de son contrat !C’est dans ce particularisme que réside toute la difficulté de cette procédure car le salarié doit continuer à « subir » les manquements de son employeur jusqu’à ce que le juge se prononce, tout en tentant de démontrer que ces manquements sont suffisamment graves pour justifier la rupture.Attention ! L’exécution du contrat se poursuit, l’employeur conserve donc son pouvoir disciplinaire sur le salarié. Cependant, le licenciement (qui ne peut avoir pour motif l’action judiciaire du salarié) intervenu après la demande de résiliation judiciaire ne sera examiné que si la demande de résiliation judiciaire est rejetée[5].
Le juge va :
A noter : les faits examinés par le juge sont ceux intervenus jusqu’au jugement, même ceux postérieurs à la demande de résiliation.++ la date des faits reprochés est importante. Le juge pourra considérer que la rupture n’est pas justifiée s’ils sont trop anciens, s’ils ont cessé ou ont été régularisés. Par exemple, un manquement datant de plusieurs années et ayant cessé risque de ne pas être jugé suffisamment grave par le juge prud’homal. Le salarié doit donc agir rapidement !
L’étude de la jurisprudence offre un panel d’exemples de manquements qui ont déjà été jugés suffisamment graves ou non.Attention ! Si certains manquements ont déjà été évalués, cela ne préjuge pas de l’analyse des manquements soumis au cas par cas car le conseil de prud’hommes fera une appréciation spécifique de chaque dossier qui lui sera soumis.
Manquements jugés suffisamment graves
Manquements jugés non suffisamment graves
- Le salarié a été discrédité par son supérieur hiérarchique ;
- Atteinte à la dignité du salarié handicapé à qui on reproche de dégager des odeurs nauséabondes évoquant des « problèmes d’incontinence »[6].
- Non-paiement des frais professionnels quand le salarié n’avait pas transmis les justificatifs ;
- Modification d’une petite part de la rémunération qui n’a pas d’incidence négative sur le montant du salaire.
Comme démontré ci-dessus, la demande de résiliation judiciaire peut s’avérer délicate à gérer pour le salarié comme pour l’employeur. Il est par conséquent recommandé d’être accompagné par un avocat en droit du travail du Cabinet Cassius Avocats notamment pour apprécier les chances de succès d’une telle procédure.
[1] Cf. fiche « Démission : quelles conditions ? »
[2] Cf. fiche « Que signifie "Prendre acte de la rupture de son contrat de travail" ? »
[3]Article L. 6222-18 du Code du travail
[4]Cass. soc., 15 mars 2005, n° 03-41.555
[5]Cass. soc, 7 février 2007, n° 06-40.250
[6]Cass. soc., 7 février 2012, n°10-18.686